Alice Miller

Alice Miller : FAQ: Comment je trouve le (la) thérapeute qui  serait bon(ne) pour moi?

 

Je sais comme il est difficile de trouver le bon thérapeute mais néanmoins je pense que c'est possible si vous connaissez vos besoins. Alors, j'essaie ici de répondre à quelques questions qui peuvent vous encourager à vérifier l'attitude du candidat qui pourrait être votre thérapeute mais je vous prie de bien vouloir considérer ce texte comme un premier jet et de ne pas hésiter à y faire ajouts ou commentaires. (J'ai décidé de parler du thérapeute et de la personne qui en cherche un comme étant deux femmes mais bien sûr les deux genres sont ici signifiés.)

1- De quoi ai-je besoin pour surmonter ma difficulté ?

Vous avez besoin d'une personne honnête, empathique, qui vous aide à prendre au sérieux la connaissance de votre corps, une personne qui ait déjà réussi à en faire de même pour elle- même parce qu'elle a eu la chance de trouver le type d'aide que vous recherchez.

2- Comment puis-je savoir si une thérapeute est ce genre de personne ?

En posant beaucoup de questions.

3- Cette idée m'effraie. Pourquoi est-ce que je n'ose pas poser de questions ?

Etant enfant, vous avez probablement été punie pour avoir posé des questions parce qu'elles ont pu ébranler vos parents dans leur position de pouvoir. Vos questions furent souvent ignorées ou on vous mentait au lieu de répondre la vérité. C'était très douloureux pour vous. Maintenant vous craignez que cela ne se reproduise. Il se PEUT que vous ne soyez pas comprise ou que vos questions déclenchent les peurs et les défenses d'une thérapeute mais vous n'êtes plus désormais cette enfant sans défenses et qui n'avait pas le choix. Vous pouvez partir et chercher une autre thérapeute. L'enfant ne pouvait pas partir, alors il essayait de changer ses parents, certaines personnes le font (symboliquement) leur vie durant. Mais en tant qu'adulte, vous avez le choix.

Vous pouvez, avec le soutien du forum, reconnaître les mensonges, la pédagogie pernicieuse, et les défenses. Il vous suffit de prendre au sérieux ce que vous entendez, ne pas nier votre malaise et ne pas espérer changer la personne (le parent) plus tard. Vous ne la changerez pas. Elle aura besoin de thérapie elle-même et ceci ne devrait pas être votre travail aussi longtemps que c'est VOUS qui payez les honoraires.

4- Je me sens coupable de ma méfiance. Si je ne peux faire confiance, je ne pourrai jamais trouver ce qui est bon pour moi.

Votre méfiance a une histoire et vous avez donc besoin d'une compréhension TOUTE PARTICULIERE. La personne qui s'occupait de vous lorsque vous étiez enfant ne méritait pas votre confiance et cette enfant que vous étiez l'a très bien ressenti parce que son corps connaissait la vérité. Elle ne pouvait développer la confiance. Désormais, faites confiance aux signaux que vous envoie votre corps. C'est l'enfant silencieux qui s'exprime, qui commence à parler et qui a besoin de votre véracité. Si vous ne vous sentez pas bien avec une personne, prenez votre ressenti au sérieux, ne le repoussez pas, essayez de le comprendre. Une fois que vous vous sentirez vraiment, profondément comprise, votre corps vous le fera savoir immédiatement et clairement. Il sera détendu sans exercice particulier.

5- Qu'est- ce que je risque à poser des questions dès le début ?

Rien. Vous ne pouvez que gagner. Si la réponse est hostile ou très incomplète ou défensive, vous pouvez gagner du temps et de l'argent en partant. D'un autre côté, si la réponse que vous recevez est satisfaisante, vous vous sentirez encouragée à en demander davantage. Et c'est ce que vous devriez faire.

6- Quel genre de questions suis-je autorisée à poser ?

Tout ce qui vous interroge. Mais surtout n'oubliez pas de questionner la candidate qui pourrait être votre thérapeute à propos de son enfance et de sa formation. Où s 'est-elle formée, qu'est-ce qui l'a aidée, qu'est-ce qui ne l'a pas aidée ? Comment se sent-elle par rapport à ses échecs, a-t-elle la liberté de voir ce qui n'était pas juste ou est-ce qu'elle protège les personnes qui l'ont blessée ? Est-ce qu'elle minimise les dommages ? Etait-elle battue enfant ? Comment évalue-t-elle cette expérience ? Est-elle vraiment consciente de ses conséquences sur sa vie d'adulte ou est-ce qu'elle nie son importance ? Evite-t-elle de se confronter à sa propre souffrance ? Dans ce dernier cas, elle fera tout ce qu'elle pourra pour vous réduire au silence, pas toujours de façon évidente.

7- Est- ce un bon signe si elle me dit qu'elle a lu Le drame de l'enfant doué d'Alice Miller ?

Ca ne veut rien dire. Demandez-lui ce qu'elle a RESSENTI à la lecture de C'est pour ton bien et des autres livres, demandez-lui son avis critique. Qu'est-ce qui l'a aidée, qu'est-ce qui ne l'a pas aidée ? Quel est selon elle le facteur le plus guérisseur ? Est-elle capable de sentiments profonds ou préfère-t-elle une analyse intellectuelle pour garder une certaine distance ? Il se peut même que vous trouviez ceci chez les thérapeutes qui travaillent en thérapie primale. Ils vous font ressentir l'enfant impuissant pendant des années et des années pour vous " aider " mais il yen a qui ne sont pas eux-mêmes prêts à ressentir leurs douleurs et se confronter honnêtement avec leurs histoires. Alors vous pourriez finir dépendant d'eux et de vos sentiments de rage impuissante et immuable contre vos parents sans être capable de vous libérer de vos émotions pénibles. Une bonne thérapeute doit vous aider à trouver et à combler VOS PROPRES besoins, négligés pendant tant de temps. Des besoins de libre expression, d'être comprise, respectée et prise au sérieux. Quand vous commencez à chercher la satisfaction de ces besoins et à protéger l'enfant, la rage et la haine vous quitteront, elles s'estomperont. Elles sont des signaux d'alarme, elles répètent à mon avis la négligence et le mépris parental.

8- Ne suis-je pas intrusive quand je pose autant de questions ?

Pas du tout. Nous avons le droit d'être suffisamment informée et elle doit avoir le courage, la conscience et l'honnêteté de nous répondre d'une manière adéquate sinon elle n'est pas la bonne personne pour nous.

9- Dans cette position, ne suis-je pas alors à la recherche d'un idéal qui n'existe pas ?

Je ne pense pas. Vous voyez sur le forum de ce site Internet que l'honnêteté, la conscience, la compassion, le courage et l'ouverture EXISTENT. Pourquoi ne devrait-on pas attendre ces qualités de la part d'un thérapeute ? Le forum (site qui était animé par Alice Miller) nous donne au moins une boussole. Nous sommes autorisés à l'utiliser.

(Traduction de l'anglais par Christine Lecoutre)

 

© Alice Miller

 

Comment créons-nous la cécité émotionnelle? 21 points

 

 

1. L'enfant est toujours innocent.

2. Tout enfant a des besoins inéluctables, entre autres de sécurité, d'affection, de protection, de contact, de sincérité, de chaleur et de tendresse.

3. Ces besoins sont rarement satisfaits, mais ils sont souvent exploités par l'adulte à ses propres fins (traumatisme de l'abus perpétré sur l'enfant).

4. L'abus que subit l'enfant a des conséquences pour toute la vie.

5. La société est du côté de l'adulte et accuse l'enfant de ce qui lui a été fait.

6. La réalité du sacrifice de l'enfant est toujours déniée.

7. On continue donc d'ignorer les conséquences de ce sacrifice.

8. L'enfant, abandonné à sa solitude par la société, n'a pas d'autre solution que de refouler le traumatisme et d'idéaliser ceux qui le lui ont infligé.

9. Le refoulement engendre des névroses, des psychoses, des troubles psychosomatiques et des crimes.

10. Dans la névrose les vrais besoins sont refoulés et déniés et le sujet vit à leur place des sentiments de culpabilité.

11. Dans la psychose, l'abus est transformé en représentation délirante.

12. Dans le trouble psychosomatique, la douleur du mauvais traitement est vécue, mais les causes véritables de cette souffrance demeurent cachées.

13. Dans le crime, la confusion, la séduction et le mauvais traitement subis trouvent constamment de nouvelles abréactions.

14. La démarche thérapeutique ne peut réussir que si l'on ne nie pas la vérité de l'enfance du patient.

15. La doctrine psychanalytique de la " sexualité infantile " s'inscrit à l'appui de l'aveuglement de la société et légitime l'abus sexuel perpétré sur l'enfant. Elle accuse l'enfant et épargne l'adulte.

16. Les fantasmes sont au service de la survie, ils aident à exprimer la réalité insupportable de l'enfance et en même temps à la cacher ou à la faire paraître plus inoffensive. Un événement ou un traumatisme fantasmatique. Soi-disant " inventé " recouvre toujours un traumatisme réel.

17. Dans la littérature, comme dans l'art, dans les contes et dans les rêves s'expriment bien souvent sous une forme symbolique des expériences de la petite enfance qui ont été refoulées.

18. Étant donné notre ignorance chronique de la situation réelle de l'enfant, ces témoignages symboliques de tourments sont non seulement tolérés mais même très appréciés dans notre civilisation. Si l'on comprenait l'arrière-plan caché de ces oeuvres, la société les rejetterait.

19. Les conséquences d'un crime qui a été commis ne sont pas effacées par le fait qu'aussi bien le criminel que la victime sont aveugles et perturbés.

20. On peut éviter de nouveaux crimes, si les victimes commencent à y voir clair; la compulsion de répétition sera ainsi levée ou affaiblie.

21. Dans la mesure où ils permettent de découvrir irréfutablement et sans ambiguïté la source de connaissance cachée dans le vécu de l'enfance, les récits des victimes peuvent aider la société en général, et la science en particulier, à augmenter leur degré de conscience.

Il n'y a pas de "bonne fessée" !

 

 

Pourquoi les fessées, les gifles et même des coups apparemment anodins comme les tapes sur les mains d'un bébé sont-elles dangereuses ?

> Elles lui enseignent la violence, par l'exemple qu'elles en donnent.

> Elles détruisent la certitude sans faille d'être aimé dont le bébé a besoin.

> Elles créent une angoisse : celle de l´attente de la prochaine rupture.

> Elles sont porteuses d'un mensonge : elles prétendent être éducatives alors qu'en réalité elles servent aux parents à se débarrasser de leur colère et que, s'ils frappent, c'est parce qu'ils ont été frappés enfants.

> Elles incitent à la colère et à un désir de vengeance qui restent refoulés et qui s'exprimeront plus tard.

> Elles programment l'enfant à accepter des arguments illogiques ( je te fais mal pour ton bien) et les impriment dans son corps.

> Elles détruisent la sensibilité et la compassion envers les autres et envers soi-même et limitent ainsi les capacités de connaissance.

 

Quelles leçons le bébé retient-il des fessées et d'autres coups?

> Que l'enfant ne mérite pas le respect.

> Que l'on peut apprendre le bien au moyen d'une punition (ce qui est faux, en réalité, les punitions n'apprennent l'enfant qu'à vouloir lui-même punir).

> Qu'il ne faut pas sentir la souffrance, qu'il faut l'ignorer, ce qui est dangereux pour le système immunitaire.

> Que la violence fait partie de l'amour (leçon qui incite à la perversion).

> Que la négation des émotions est salutaire (mais c'est le corps qui paie le prix pour cette erreur, souvent beaucoup plus tard).

> Qu'il ne faut pas se défendre avant l'âge adulte.

 

C'est le corps qui garde en mémoire toutes les traces nocives des supposées "bonnes fessées".

 

Comment se libère-t-on de la colère refoulée?

> Dans l'enfance et l´adolescence :

- On se moque des plus faibles.

- On frappe ses copains et copines.

- On humilie les filles.

- On agresse les enseignants.

- On vit les émotions interdites devant la télé ou les jeux vidéo en s'identifiant aux héros violents. (Les enfants jamais battus s'intéressent moins aux films cruels et ne produiront pas de films atroces, une fois devenus adultes).

 

> A l'âge adulte :

 - On perpétue soi-même la fessée, apparemment comme un moyen éducatif efficace, sans se rendre compte qu'en vérité on se venge de sa propre souffrance sur la prochaine génération.

- On refuse (ou on n'est pas capable) de comprendre les relations entre la violence subie jadis et celle répétée activement aujourd'hui. On entretient ainsi l'ignorance de la société.

- On s'engage dans les activités qui exigent de la violence.

- On se laisse influencer facilement par les discours des politiciens qui désignent des boucs émissaires à la violence qu'on a emmagasinée et dont on peut se débarrasser enfin sans être puni: races " impures ", ethnies à " nettoyer ", minorités sociales méprises.

- Parce qu'on a obéi à la violence enfant, on est prêt à obéir à n'importe quel autorité qui rappelle l'autorité des parents, comme les Allemands ont obéi à Hitler, les Russes à Staline, les Serbes à Milosevic.

 

>  Inversement, on peut prendre conscience du refoulement, essayer de comprendre comment la violence se transmet de parents à l'enfant et cesser de frapper les enfants quel que soit leur âge. On peut le faire (beaucoup y ont réussi) aussitôt qu'on a compris que les seules vraies raisons de donner des coups "éducatifs" se cachent dans l'histoire refoulée des parents.